Allocution de S.M le Roi Mohammed VI relative à la création d’un prix des Droits de l’Homme

Rabat le 09/12/2000

"Louange à Dieu
Que la paix et prière soient sur le Prophète, Sa Famille et Ses Compagnons,
 
Mesdames et Messieurs,
 
Nous nous sommes engagé envers notre peuple fidèle, depuis notre accession au Trône de nos glorieux ancêtres, à emprunter la voie juste qu’ils ont suivie, en faisant de la justice le fondement et la finalité de notre système de gouvernement, et à parachever l’édification d’un Etat de droit moderne, œuvre lancée grâce à la volonté commune de nos regrettés grand-père et père, feu leurs Majestés Mohammed V et Hassan II - que Dieu bénisse leur âme - et de l’ensemble des composantes de la Nation marocaine, dans le cadre d’une Monarchie constitutionnelle, démocratique et sociale, fondée sur l’attachement aux droits de l’Homme, tels qu’ils sont universellement reconnus.
 
Partant du fait que la préservation des droits de l’Homme, des libertés des citoyens, de la collectivité et des organisations et la garantie de leur exercice, relève des prérogatives dont nous sommes dépositaire, nous nous sommes engagé à promouvoir les droits de l’Homme et à préserver la dignité du citoyen dans le cadre d’une approche globale des droits de l’Homme les considérant comme un puissant levier de développement, aux dimensions politique, économique, sociale et culturelle étroitement imbriquées.
 
Nous avons sitôt fait de créer une instance indépendante d’arbitrage qui s’est penchée sur l’indemnisation pour les préjudices résultant des disparitions forcées et des détentions arbitraires.
 
Nous voudrions, à cette occasion, rendre un hommage particulier aux membres de cette commission pour la sagesse, l’impartialité et l’objectivité dont ils ont fait preuve dans leur traitement de cette question épineuse, et réitérer notre ferme volonté de renforcer cette instance en la dotant de tous les moyens matériels et humains pour clore définitivement ce dossier de la manière la plus équitable, la plus juste et la plus civilisée qui soit, afin de mobiliser toutes les énergies pour parachever l’édification de l’Etat de droit, meilleur rempart contre toutes formes d’abus.
 
Mesdames et Messieurs,
 
Le conseil consultatif des droits de l’Homme dont nous recevons avec plaisir les membres, en ce jour béni, ainsi que les membres des instances qui en sont issues, a contribué, depuis sa création il y a dix ans par notre vénère Père, que Dieu bénisse son âme, par ses avis consultatifs qui procèdent des vertus de dialogue, de probité, et d’attachement au droit et à l’équité, à aider le premier serviteur du Maroc, à protéger les droits civiques et politiques. Le conseil est devenu ainsi une structure essentielle dans l’armature institutionnelle nationale et une instance respectée au plan international.
 
Nous tenons à faire part à l’ensemble de ses membres de notre haute bienveillance et de notre immense satisfaction, pour le capital positif qu’il a accumulé dans ce domaine.
 
Dans le cadre de notre souci constant de moderniser et de rationaliser toutes les institutions, afin qu’elles soient capables de relever les défis du Maroc du XXIème siècle, et pour mettre en œuvre la révision du dahir portant création du conseil que nous avons annoncée dans le discours du Trône, nous voudrions saisir l’occasion de la célébration de l’anniversaire de la déclaration universelle des droits de l’Homme, pour mettre en exergue les grandes lignes de la réforme que nous envisageons, et qui vise à élargir les attributions du Conseil, le renouvellement de sa composition, la rationalisation de ses méthodes de travail pour mieux le qualifier à consacrer les droits civiques et politiques, en accordant la plus grande importance aux droits économiques, sociaux et culturels.
 
Il importe, à cette fin, d’élargir les attributions du conseil pour englober, outre les questions que nous lui soumettons pour avis, le traitement des cas de violation des droits de l’Homme et la présentation de recommandations à leur sujet, l’harmonisation de la législation nationale avec les conventions internationales des droits de l’Homme, la diffusion de la culture des droits de l’Homme et le développement de la coopération internationale du Royaume dans ce domaine. Il importe également qu’il se préoccupe des droits de nos fidèles sujets, séquestrés à Tindouf pour aboutir à la levée du siège qui leur est imposé et qu’il veille d’autre part à coordonner son action avec les organismes étrangers similaires en vue de préserver la dignité des Marocains immigrés.
 
Le fait d’habiliter le Conseil à soumettre à notre Majesté des avis consultatifs et des recommandations ainsi qu’un rapport annuel sur la situation des droits de l’Homme, est de nature à nous permettre d’avoir une vue objective sur les dysfonctionnements et les insuffisances qu’il importe de corriger, mais de relever également les avancées en vue de les consolider et de les fructifier.
 
Partant de notre volonté d’encourager les nobles actions dans ce domaine, nous avons décidé d’instituer un prix annuel des droits de l’Homme, qui sera attribué, sur proposition du Conseil, à la personnalité ou à l’Organisation nationale ou étrangère qui mérite d’en être le récipiendaire.
 
Afin que le Conseil puisse s’acquitter de ces nobles missions, la réforme escomptée doit porter sur la révision de sa composition et des critères pour en être membre, car il faut veiller à ce que le Conseil devienne une instance assumant une mission de réflexion, de conseil et de promotion des droits de l’Homme, regroupant des personnalités éminentes choisies et proposées sur la base des critères d’impartialité, d’intégrité morale, de compétence intellectuelle, d’attachement sincère aux droits de l’Homme et d’apport méritoire dans leur consolidation.
 
Mesdames et Messieurs,
 
Nul doute qu’une telle réforme, confortée par la rationalisation des méthodes de travail du Conseil et de ses organes permettra à notre pays d’être au diapason de son époque, en conformité avec les engagements internationaux dans le domaine des droits de l’Homme et en parfaite harmonie avec son patrimoine pérenne fondé sur l’honneur fait à l’homme par Dieu.
 
La consécration des droits de l’Homme sur le terrain et afin qu’ils deviennent une réalité concrète requiert un combat de longue haleine et appelle un effort colossal, auquel chacun - toutes tendances et sensibilités intellectuelles et politiques confondues -, et quelle que soit la complexité et la sensibilité des questions soulevées, doit participer. Il ne s’agit point de réduire la question des droits de l’Homme à la seule liquidation des séquelles d’une certaine conjoncture, mais d’en rehausser l’approche au point de les consacrer en tant que culture dont l’enracinement implique un combat au quotidien et des efforts inlassables.
 
Pour permettre au Conseil, dans sa composition et ses attributions nouvelles, d’être, auprès de Notre Majesté, d’un précieux concours dans la préservation de la dignité humaine, la consécration du droit, la lutte contre l’injustice, le parachèvement de l’édification d’une société démocratique où nul ne subit d’injustices ou de privations, nous exhortons l’ensemble des formations, appelées à présenter des candidatures au Conseil, à veiller à ce que ces candidats répondent au profil défini, et de prendre en compte les orientations générales que nous avons annoncées et qui seront stipulées dans le Dahir à l’élaboration duquel nous allons veiller dans un très proche avenir, par la grâce de Dieu.
 
Vous trouverez Notre Majesté constamment à l’avant-garde des défenseurs de la consolidation des droits de l’Homme, le recours sûr pour leur protection et le garant de la mise en œuvre des avis consultatifs du Conseil, de par la force de loi que leur confère notre approbation.
 
Que la paix, la bénédiction et la Miséricorde de Dieu soient sur vous".