Message de S.M. le Roi à la 2ème session du bureau permanent de l’UAA

Casablanca le 20/11/2000

"Louange à Dieu,
Que la paix et la prière soient sur le Prophète, Sa Famille et Ses Compagnons,
 
Mesdames et Messieurs,
 
C’est avec plaisir que nous nous adressons à vous à l’ouverture des travaux de la deuxième session annuelle du bureau permanent de l’Union des avocats arabes, souhaitant la bienvenue à tous les participants à cette importante rencontre, partant de notre fierté d’appartenir à la famille du droit, et de la considération particulière que nous portons à l’ordre des avocats, qui partagent avec la famille de la magistrature la mission d’établir la justice dont nous avons fait le fondement et la finalité de notre projet de société démocratique et moderne.
 
suivant la juste voie de notre vénéré père, feu S.M. le Roi Hassan II, que Dieu bénisse son âme, nous avons tenu à accorder notre Haut patronage à votre réunion bénie en hommage à l’Union des avocats arabes, cette prestigieuse institution de droit qui a été à l’avant-garde du combat pour la libération et la démocratie, et qui a contribué de manière active et efficiente, depuis plus d’un demi-siècle, à la lutte pour la consécration des principes de l’Etat de droit, la protection des droits de l’Homme et la sauvegarde des nobles principes de la profession d’avocat.
 
Une institution qui a, en outre, soutenu toutes les démarches unitaires dans le monde arabe, rejeté le séparatisme et le morcellement et toujours veillé à apporter son soutien actif aux causes décisives de la nation arabe, avec à leur tête le juste combat du peuple palestinien pour le recouvrement de ses droits légitimes.
 
Le fait que vous ayez baptisé cette importante rencontre session d’Al-Qods, constitue un témoignage de votre solidarité avec l’Intifada d’Al-Aqsa en faveur de laquelle nous n’avons cessé, en notre qualité de président du Comité Al-Qods, de mobiliser toutes les potentialités, de consentir tous les efforts et de prendre toutes les initiatives afin de soutenir son jihad inlassable, pour la défense de la première Qibla et troisième Lieu Saint, la libération de la Palestine du joug de l’occupation israélienne inique et l’avènement de l’Etat palestinien indépendant avec Al-Qods Al-Charif comme capitale.
 
En partageant avec la nation arabe l’honneur du combat pour soutenir l’Intifada d’Al-Qqsa, vous saisissez combien l’arme que vous détenez est efficace, l’arme du droit, de la loi, de la légalité, de la justice et de l’équité, pour faire cesser les tueries perpétrées par la machine de guerre israélienne contre le peuple palestinien sans armes.
 
Partant de l’influence déterminante de la défense des droits de l’Homme, des organisations non gouvernementales nationales et internationales et de l’opinion publique nationale et internationale sur l’opération de prise de décision, nous vous exhortons à redoubler d’efforts en vue de mettre à contribution ces mécanismes essentiels, à l’influence certaine sur les relations internationales, afin d’obtenir le soutien le plus large de la communauté internationale au droit arabe sur Al-Qods éprouvée, dont le combat légitime trouve son illustration dans la devise de votre honorable union: droit et arabité, et de faire prévaloir l’option de la paix, du dialogue et de la légalité, à laquelle nous sommes attachés, sur le recours à la machine de guerre, à la politique du fait accompli imposé par la force des armes.
 
Mesdames et Messieurs
 
Votre position constante de soutien aux droits palestiniens ne procède pas seulement du sentiment d’appartenance à la nation arabe et de l’impératif de soutenir ses causes, mais découle essentiellement de la prise de conscience du caractère universel de la mission de l’avocat, basée sur la préservation de la dignité humaine, la défense des idéaux de justice et d’équité et la protection des libertés publiques individuelles et collectives. Cette position découle également du fait que la profession d’avocat est une mission humanitaire noble et indispensable dans toute société, tirant sa grandeur et sa vertu de l’affirmation du droit, de la lutte contre l’injustice et du concours qu’elle apporte à la justice pour la réalisation de ces nobles desseins.
 
Eu égard à ces nobles principes de la profession d’avocat, les lois nationales et les conventions internationales ont consacré le droit à la défense et à un procès équitable, confirmant ainsi la mission universelle de cette profession.
 
Les valeurs de cette honorable profession sont également liées à l’intérêt général, en raison de sa contribution active à la consécration de la justice en facilitant le recours de tout un chacun au domaine du droit et de justice. Il convient aussi de relever la forte charge politique de cette profession en raison de l’action permanente des avocats pour asseoir les fondements d’une justice honnête et indépendante, du fait du lien étroit entre Etat de droit et justice, du rôle déterminant de celle-ci dans la consolidation des fondements de la société démocratique et la défense des droits de l’Homme, avec tout ce que cela a comme répercussions positives sur la stabilité politique et la garantie d’un environnement sain et incitatif au développement économique et social.
 
La profession d’avocat occupe une place privilégiée dans la société démocratique moderne du fait du rôle central joué par l’avocat dans l’instauration de la justice et la défense de l’Etat de droit. Mais, a mesuré que se renforce la place centrale de cette profession, l’on voit se multiplier des défis professionnels, internes et externes, à même d’empêcher l’avocat d’assumer son rôle fondamental consistant à éclairer la justice pour réaliser l’équité escomptée.
 
Parmi les grandes entraves professionnelles internes qui influent négativement sur la profession figurent l’atteinte à son éthique et à ses valeurs et le fait de faire prévaloir les considérations matérielles sur les nobles principes humanitaires qui la régissent, ce qui conduit au manquement aux devoirs qu’impose la profession à l’avocat. Ces entraves ne portent pas atteinte uniquement à la sacralité de la profession d’avocat, mais influent aussi négativement sur la protection juridique qui doit être assurée à l’ensemble des justiciables, cette protection dont la garantie constitue l’essence même de l’action de l’avocat et de sa mission.
 
En ce qui concerne les entraves externes, il suffit de rappeler les défis auxquels la profession d’avocat est confrontée et qui visent à la dévier vers le secteur des prestations commerciales, à la soumettre à la loi du marché et à l’entraîner sur la scène de la concurrence internationale, ce qui porte atteinte à sa mission authentique. Tout cela n’est que le résultat des mutations économiques mondiales accélérées et de la dimension internationale que revêt désormais la loi, particulièrement à travers les conventions internationales, qui concernent le droit des affaires, les délits économiques, l’environnement, les nouvelles technologies de la communication et l’évolution accélérée en matière de biologie et d’autres sciences, ce qui implique pour l’avocat d’être parfaitement au fait du domaine de son intervention et de présenter une prestation juridique d’une haute qualité, en assumant pleinement sa responsabilité professionnelle.
 
Du fait de ces défis, la profession d’avocat se trouve actuellement en position de défense pour ne pas se défaire de ses règles, de ses traditions et de ses coutumes et perdre ainsi la confiance de ceux qui y recourent. Ces défis ne peuvent être relevés qu’en oeuvrant pour reformer et structurer la profession conformément à une organisation moderne et évoluée, qui préserve à la profession d’avocat son indépendance et son inviolabilité et garantit en même temps son développement et son adaptation aux nouvelles exigences.
 
Ce défi vital ne peut être relevé qu’en assurant à la profession ses garanties d’éthique et ses coutumes authentiques contraignantes et en améliorant les compétences de l’avocat et le niveau d’accomplissement de sa mission, non seulement pour être plus au fait du domaine juridique mais aussi pour être efficace dans l’exercice de la profession, maîtrisant les nouvelles technologies du savoir et de la communication, ouvert sur la culture humaine et ayant une connaissance approfondie des nouvelles méthodes de management et de gestion. Car, toute négligence de ces facteurs est de nature à hypothéquer la liberté de l’avocat et son indépendance, deux conditions qui constituent le fondement et la garantie du succès de sa mission.
 
Tout en saluant l’initiative de vos collègues avocats marocains d’accueillir cette session, leur prise de conscience et leur adhésion volontaire au processus que nous menons actuellement pour l’édification d’une société démocratique moderne, nous réaffirmons notre foi en la capacité de tous les avocats arabes à assumer les responsabilités qui sont les leurs et à relever tous les défis qui se profilent avec ce début du troisième millénaire, comme ils avaient relevé les défis du siècle que nous quittons, vu leur attachement constant aux valeurs de la justice et de l’équité, leur perspicacité, leur persévérance et leur action commune avec la famille de la justice pour soutenir le développement et la démocratie et consolider les fondements de l’Etat de droit. Vous trouverez auprès de notre Majesté et du royaume du Maroc le meilleur soutien pour la réalisation de ces nobles objectifs.
 
Que la paix, la Miséricorde et la bénédiction de Dieu soient sur vous.